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(Le Grand Prix de Tours édition 2008, ce sera les 06,07 et 08 juin )
La course du 2 juillet 1923 au nord de Tours
Le circuit faisait 22.8 km à parcourir 35 fois , soit 800 km. Il y eu environ 20.000 spectateurs payants. Et des pointes à 200 kmh...
Le départ est donné du lieu-dit La Noue-Guérinet, sur la Route Nationale 158, entre Neuillé- Pont-Pierre et La Membrolle. Regroupées à deux cents mètres des tribunes et de la ligne de départ, les dix-sept voitures s'élancent à huit heures vers La Membrolle, où un dangereux virage en épingle à cheveux, en plein bourg, leur fait emprunter la Nationale 159. Sorties des sinueuses voies de la petite commune, elles vont rencontrer un peu plus loin les "S" de l'étang des jumeaux, très périlleux également. La section suivante est plus facile et, au carrefour de la départementale 48, elles vont remonter vers le nord, traverser les rues de Semblançay et rejoindre la Nationale 158 à proximité de Neuillé-Pont-Pierre. De forme triangulaire ce circuit développe 22,830 km.
Dix sept concurents au départ:
6 étrangers et 11 francais : Quatre Voisin , Quatre Bugatti , Deux Rolland
Pilain, Une Delage 12 cylindres, Trois Sunbeam. C'est l'anglais Seagrave qui
l'emporte sur sa Sunbeam en 6 h 35 mm..
La Course:
Thomas et sa puissante Delage prennent la tête au départ, Guyot étant
en quatrième position. Moins de dix minutes plus tard, la meute réapparaît,
menée par la Fiat de Bordino. Les Rolland- Pilain de Guyot et Hémery
sont respectivement huitième et dixième. L'italien roule très
vite, sa moyenne est de 140 km/h, et au cinquième tour, si Guyot est remonté à la
septième place, il a déjà sept minutes de retard sur le
leader, tandis qu'Hémery est descendu d'un rang, avec plus de douze minutes
de retard : au bout de moins d'une heure de course c'est déjà beaucoup.
Hélas, cet écart est dû à des ennuis mécaniques
et, au huitième tour, la Rolland-Pilain numéro 13 doit se retirer
sur panne de pompe à huile.
Guyot, sur sa numéro 3, reste donc seul à porter les espoirs du public tourangeau et il le fait avec un certain bonheur. Au dixième tour, il est en quatrième position, à moins de sept minutes du premier, soit le même écart que cinq tours plus tôt, mais le premier a changé : Bordino a cassé son compresseur et c'est donc la Sunbeam de Lee Guinness qui a pris le commandement, devant les deux autres Fiat, groupées en dix secondes à quatre minutes de l'anglais.
La Rolland-Pilain se comporte brillamment et se maintient longtemps en quatrième
position, se montrant, sans conteste, la plus rapide des françaises
depuis l'abandon de la Delage au dixième tour. Au quinzième
tour, la Sunbeam de tête a des ennuis d'embrayage et les deux Fiat
prennent sa place, Guyot ne se trouvant plus qu'à quatre minutes du
premier : tous les espoirs sont permis puisque la mi-course n'est pas encore
atteinte. Effectivement, au dix-septième des trente-cinq tours, Guyot
est pointé en deuxième position, à moins de trois minutes
de la Fiat de Salamano. A vrai dire, cette deuxième place est un peu
artificielle, car elle est due au jeu des arrêts de ravitaillement
qui ne se produisent pas forcément au même moment pour tous
les concurrents. Et en effet, s'arrêtant au tour suivant à son
stand, Guyot réintègre sa quatrième place.
C'est sans doute à ce stade de la course que, selon un plan établi à l'avance,
Emile Pilain donne à son pilote le signal convenu pour lui indiquer
qu'il est temps de forcer son allure.
La bataille est acharnée entre Fiat et Sunbeam qui occupent tour à tour la première position et Guyot est bien placé, en embuscade, à six ou sept minutes de l'homme de tête. Au vingt-cinquième tour, il est toujours quatrième mais a perdu un peu de terrain, à neuf minutes du premier : il y a plus de quatre heures et demie que la course a débuté et il reste encore dix tours à parcourir, soit 228 kilomètres. Le combat auquel se livrent la Fiat de Salamano et les deux Sunbeain de Divo et Segrave a fait remonter la moyenne et l'on peut craindre (espérer ?) que leurs mécaniques n'en souffrent, ce qui pourait faire les affaires de la Rolland-Pilain.
Depuis maintenant cinq heures, la vaillante tourangelle est aux avant-postes.
Dans les stands et dans les tribunes, le coeur des dirigeants et des mécaniciens
de la place Rabelais bat de plus en plus fort. Tout au long du circuit se
sont répartis les autres membres du personnel, ouvriers et employés,
et chacun voit arriver le moment du triomphe tant attendu car, nul n'en doute,
les trois étrangers vont s'épuiser et la française,
la tourangelle, va les coiffer sur le poteau.
Au Grand Prix de 1914, c'est au cours du dix-huitième tour, après 650 kilomètres et plus de six heures de course, que s'était amorcé le deuil national que représentait la défaite de la Peugeot de Boillot. Ici, c'est au cours du vingt-huitième tour, après plus de 600 kilomètres et plus de cinq heures de course, que le public tourangeau va connaître la même désillusion : la pompe à huile de la Rolland-Pilain de Guyot a lâché ! Dès lors, peu importe quel sera le vainqueur !
A deux tours de la fin, la Fiat de tête est, elle aussi, contrainte à l'abandon,
laissant la victoire à la Sunbeain de Segrave, au bout de 6 h 35 m.
19 s d'efforts, avec dix-neuf minutes d'avance devant son coéquipier
Divo. La troisième est la Bugatti de Friederich, qui franchit la ligne
d'arrivée vingt-cinq minutes après le vainqueur, devançant
de deux minutes la troisième Sunbeam.
La cinquième et dernière, la Voisin de Lefebvre, aura roulé une
heure et quart de plus que la première car, en 1923 encore, la course
n'est terminée que lorsque le dernier classé a effectué la
totalité du parcours.
A titre de consolation, on peut dire que la Rolland-Pilain a été,
et de très loin, la plus performante des françaises en piste
ce jour-là. Le Moteur et Le Chauffeur Français rendent hommage à la
firme tourangelle en ces termes :
« Quant à Rolland-Pilain, il n'est pas exagéré de dire que
le circuit de Touraine fut pour lui une belle journée. La chance ne
fut jamais ses droits, mais n'oublions pas que Guyot jusqu'à mi-course
fut le second derrière Fiat et qu'il frisa un moment la victoire, alors
que la glorieuse incertitude du sport régnait en maîtresse pendant quelques tours.
Un accident stupide, la rupture d'un ressort de pompe à huile, lui
enlève sa chance; mais ce que nous avons pu juger de la tenue de la
voiture en course justifie les espoirs pour l'avenir
De toutes les voitures du lot, la Rolland-Pilain était certainement
celle qui avait les reprises les plus nettes, les plus franches et les plus
foudroyantes. Nous ne savons pas meilleur compliment à faire à une
voiture. Si nous ajoutons que Guyot, en vieux conducteur et en fin mécanicien,
a toujours mené "en dedans", c'est-à-dire qu'il a systématiquement évité de
demander à sa voiture toutes ses possibilités, nous avons assez
indiqué que la marque Rolland-Pilain est de celles qui doivent un jour
inscrire leur nom au palmarès. »
La revue anglaise The Autocar, après le combat dantesque qui avait vu le k.o. infligé à Fiat par Sunbeam, qualifiait cette course de « the most thrilling Grand Prix ever seen ». Les supporters de l'équipe tourangelle, malgré leur déception finale, pourraient faire leur cette appréciation et la traduire de façon un peu libre par « le plus excitant de tous les Grands Prix disputés par Rolland-Pilain ».
Albert Guyot N° 3 et Victor Hemery N° 13 au Grand Prix de Tours 1923
Article de Jacques Feneant:
Quelle affluence et quelle animation dans la ville " Nos braves agents ont
fort à faire pour tempérer les griseries dangereuses de vitesse
qui frappent certains chauffeurs Ils rappellent énergiquement aux imprudents,
le sifflet aux lèvres et le baton à la main, que nos rues passantes
et devenues trop étroites ne sauraient être transformées
en piste de circuit, rapporte un reporter On enregistra un flot de cinq cents
voitures à l'heure sur la route de Paris la veille de la première épreuve
et plus de vingt mille spectateurs acquittèrent un droit d'entrée,
fixé à 3 F le dimanche 1er juillet et à 4 F le lendemain.
Fabuleux succés. La première journée fut réservée
aux Voitures de tourisme réparties en trois catégories, chacune
se voyant attribuer une quantité d'essence déterminée Mathis
et Peugeot se partagèrent les lauriers
Le circuit de la Membrolle connut toutefois son épreuve-vedette le lendemain
2 juillet, en présence du ministre des Travaux Publics Le Trocquer, du
préfet et des parlementaires lesquels purent ainsi admirer les bolides
bleus, verts ou rouges, couleurs des marques françaises, anglaises et
italiennes, lancés a plus de 190 kmh en ligne droite.
Les grands titres de la presse résumèrent parfaitement l'épreuve
: L'industrie anglaise triomphe avec Sunbeam dont les trois voitures terminent
première, seconde et quatrième Bugatti se classe troisième.
Un lamentable accident fait de nombreuses victimes,. Le malheur des Fiat et des
Rolland-Pilain " La victoire de Seagrave sur Sunbeam, en 6 h 35 mn, à la
moyenne de 121 kmh, fut en effet ternie par l'accident provoque, dés le
1er tour, par la Bugatti nø 11 pilotée par de Viscaya. entre la
passerelle de la Membrolle et le virage. Son auto vint heurter en biais la palissade
et la renversa sur une certaine longueur. La Bugatti, en fin de course, alla
s'écraser sur un poteau télégraphique qui s'abattit sur
les spectateurs, provoquant une quinzaine de blesses dont certains grièvement.
Ils furent soignes dans les cliniques de Tours et reçurent la visite des
autorités fort émues et très ennuyées par cette ombre
faite à une aussi belle manifestation.
Pour ne pas terminer sur une note trop lugubre, les journaux se firent aussi
l'écho de petites anecdotes plaisantes ( On dit que les autos, des Fiat
et des autres, avaient été mises à la disposition de la
presse. Il y avait beaucoup de petites femmes dans ces voitures mais pas un seul
rédacteursportif des quotidiens de la région Les parents pauvres sont toujours
au bout de la table )
Sur cette page des extraits de "Rolland Pilain - La voiture
des As, l'As des voitures" de Rouxel et Blanchet aux Editions Page de Garde
Extraits d' article de Jacques Feneant - Du magazine de Touraine